La Diva aux pieds nus






Cesaria Evora est une légende. Le personnage (une vraie diva !), sa vie... Tout semble extrait d'un roman; et pourtant : quelle authenticité ! Cesaria -surnommée "Cize" par ses amis et "la diva aux pieds nus" par les chercheurs de slogans- est née le 27 Août 1941 à Mindelo, au Cap-Vert.
Très tôt, elle est remarquée pour sa voix alerte et son physique agréable. Mais la vie ne lui accordera la consécration que vers la cinquantaine. Il lui faudra attendre 1988 pour qu'un jeune français d'origine capverdienne, José Da Silva, lui propose de venir à Paris faire un disque. Là, les critiques s'enflamment. "Cesaria Evora, la cinquantaine bien vécue, chante la morna avec une dévotion canaille... Elle appartient à cette aristocratie mondiale des chanteuses de bar" proclame le journal Le Monde. La presse la compare à Billie Holliday, soulignant son goût immodéré pour le cognac et le tabac, son existence difficile dans des îles oubliées... En plus de ce blues des îles qu'est la morna, elle chante aussi la joyeuse Coladeira.
En 1993, son album "Miss Perfumado" fait un malheur. A Lisbonne, la police est obligée de contenir la foule devant le théâtre où elle se produit. En 1995, elle reçoit la première de ses trois nominations aux Grammy Awards et entame sa première tournée américaine à laquelle assistent Madonna, David Byrneet le tout New York. Belle revanche du talent sur la fatalité. Le gouvernement, fier de son ambassadrice du Cap-Vert, lui procure un passeport diplomatique. A partir de là, les amateurs de musiques s'intéressent aux traditions capverdiennes et impulsent un vent positif dans la communauté artistique de l'île. Plus ou moins proches de la diva, toute une génération de musiciens se fait connaître: Bana l'autre grande figure du Cap-Vert, Bau, le joueur de cavaquinho, qui assume un temps le rôle de chef d'orchestre de Cesaria, Tito Paris, un jeune chanteur-compositeur qui écrit pour la diva, ou Teofilo Chantre qui collaborera avec Goran Bregovic et Cesaria sur la bande originale du film de Patrice Chéreau, "La Reine Margot". Tous se font un nom dans le glorieux sillage de la chanteuse.
En 1999, pour "Café Atlantico", elle voyage à Cuba où elle enregistre avec le mythique Orquesta Aragon et fait appel à l'arrangeur favori de Caetano Veloso, Jaques Morelenbaum. Sur ce disque, elle rend hommage à sa ville natale, Mindelo, port de l'île de Sao Vicente, s'offre une reprise du "Maria Elena" popularisé par Nat King Cole, ose la rencontre des instruments du Cap-Vert avec la kora mandingue, un des titres sera même remixé en techno, mais là, elle déclare n'y être pour rien.Maintenant, sa popularité est définitivement assise et elle l'assume. Elle a renoncé aux alcools forts et ne se plie qu'avec parcimonie aux exigences du service après-vente, préférant les conférences de presse aux interviews particulières. En 2001, elle retrouve l'Orquesta Aragon, Jaques Morelenbaum et fait un duo avec Caetano Veloso pour "Sao Vicente di longe". Elle fête la sortie de ce nouvel album au Zénith parisien lors d'une nuit capverdienne où, bien sûr, elle est consacrée reine.